Choisir son ravitaillement pendant les activités nordiques

Par Laurent Kurtzemann, coach nutrition et trail

Les sports nordiques sont très exigeants sur le plan physique. Et comme pour tout sport, une alimentation adaptée peut aider à prendre plus de plaisir ou à améliorer ses performances que ce soit sur les skis ou raquettes aux pieds. C’est de cette alimentation de l’effort dont je vais vous parler aujourd’hui. Au fil de cet article, vous allez découvrir comment se passe la digestion dès que vous élevez votre rythme cardiaque et surtout les répercussions sur ce qu’il est préférable de manger et de boire lors de vos activités préférées.

REPOS ET EFFORT, DEUX DIGESTIONS DIFFÉRENTES

Avant de vous parler de ce que vous allez manger, laissez-moi vous expliquer comment vous allez le digérer. C’est important pour la suite, car il faut savoir que la digestion ne se passe pas de la même manière selon qu’elle se déroule :

  • Au repos ou lors d’une simple balade.
  • Pendant un effort d’intensité moyenne à forte.

Dans le premier cas, je n’ai pas de recommandations particulières à vous donner autres que de boire suffisamment et de manger selon votre faim, comme vous le feriez lors d’une rando estivale ou d’une longue balade à vélo. Privilégiez les aliments que vous digérez bien, et profitez du paysage !

Par contre, dès que l’on aborde un effort plus soutenu, il convient de respecter quelques règles pour que tout se passe bien et éviter la panne d’essence. Par effort soutenu j’entends tout effort qui vous obligera à respirer plus fort que d’habitude et vous fera transpirer plus ou moins abondamment. Un effort qui vous demandera aussi un peu d’engagement pour maintenir le rythme.

Alors, comment se passe la digestion ?

Dans la bouche

Pour les aliments solides, la mastication est la première étape de la digestion. Elle permet de réduire la taille et d’accroître la surface des aliments, augmentant ainsi la zone de contact entre ces aliments et les enzymes digestives contenues dans la salive. Ce qui facilitera la suite du processus. Ainsi, la digestion commence littéralement dans la bouche, et en particulier celle des glucides qui commencent à être décomposés par les enzymes salivaires.

Par ailleurs, bien mâcher est particulièrement important pour tout ce qui est végétal, car cela permet de broyer une partie des fibres alimentaires, rendant les fruits ou les barres de céréales plus faciles à digérer.

Dans l’estomac

Une fois avalée, votre nourriture (ou votre boisson) atterrit dans l’estomac. Comme tous les organes humains, l’estomac utilise l’oxygène qu’il puise dans le sang. Or, quand vous skiez, vos muscles ont des besoins accrus en oxygène. Pour les satisfaire, ils détournent jusqu’à 80% du sang destiné au tube digestif en temps normal (c’est-à-dire au repos). L’estomac et le tube digestif en général fonctionnent alors avec un débit réduit, ce qui diminue d’autant leurs capacités de digestion et d’absorption.

Dans les intestins

Une fois que les aliments broyés et malaxés quittent l’estomac, ils cheminent le long de l’intestin grêle puis du gros intestin. Là, ils finissent d’être décomposés en protéines, en glucides, en lipides, en vitamines et en minéraux, puis ils traversent la paroi intestinale pour passer dans le sang qui les transportera vers les organes.

En cours d’effort, le sucre est votre ami !

Vous savez maintenant que la digestion à l’effort ne se passe pas aussi facilement qu’au repos. Et qu’il convient de faciliter le travail de votre tube digestif pour qu’il puisse en retour fournir tout le carburant nécessaire à vos activités nordiques.

Pour trouver son énergie, le corps privilégie soit les graisses, soit les glucides. Un peu de protéines aussi, mais finalement assez peu comparé au reste.

À basse intensité, nous consommons plus de graisses que de glucides. Quand l’intensité augmente, la proportion de glucides utilisés augmente elle aussi tandis que celle des graisses diminue. Et quand on est à fond, on n’utilise plus que des glucides et plus du tout de graisses. On pourrait donc se dire qu’un mélange glucides + graisses est l’idéal dans la plupart des cas.

Or même si l’on est très mince, nos réserves de graisse sont suffisantes pour nous fournir en énergie pendant des jours. Il n’est donc pas nécessaire d’en inclure dans son ravitaillement. On se concentrera donc sur les glucides. Et pas n’importe lesquels.

Je vais peut-être vous surprendre et aller à contre-courant des recommandations habituelles de la nutrition-santé, mais en cours d’effort vous avez tout intérêt à privilégier les sucres rapides, c’est-à-dire ceux que l’on trouve généralement dans les boissons sucrées, les pâtes de fruits ou les produits énergétiques. Rassurez-vous, ils n’auront aucun effet négatif sur votre santé ou votre tour de taille. Car s’il y a un moment où vous pouvez manger des bonbons sans remords, c’est bien pendant le sport !

 

En effet, à partir d’une intensité moyenne comme celle décrite en début d’article, les sucres ne sont plus assimilés de la même manière qu’au repos. Ils sont directement acheminés dans les muscles où ils sont immédiatement consommés. De plus, comme les sucres rapides sont plus digestes que les sucres lents (ceux contenus dans les céréales, le pain complet, etc.), le tube digestif, qui fonctionne avec 80% de sang en moins, les absorbe plus facilement.

Bon, quand je dis que l’on peut manger du sucre en skiant, il ne faut pas abuser non plus. Les quantités recommandées sont les suivantes :

  • De 0 à 1h-1h15 d’effort : pas besoin de sucre. On fait avec les réserves constituées durant le dernier repas.
  • De 1h15 à 2h : environ 30 grammes de sucre par heure.
  • De 2h à 3h : environ 60 grammes de sucre par heure.
  • Pour les efforts de plus de 3h (type Transjurassienne) : on pourra monter à 90 grammes par heure, à condition de s’y être entraîné au préalable pour éviter tout souci de digestion. Dans le doute, rester sur 60 grammes par heure, ce qui ne pose généralement pas de problème.

 

Pour savoir si vous emportez suffisamment de sucres dans votre sac, il vous faudra lire les étiquettes des produits. Mais si vous vous demandez ce que représentent 30 grammes de sucre dans la vraie vie, voici quelques équivalences :

  • Une pâte de fruits = 15 à 20 grammes, selon sa taille.
  • Un petit sachet de crocodiles de toutes les couleurs = environ 35 grammes.
  • Une dose de boisson énergétique en poudre à diluer = 25 grammes (à vérifier sur l’étiquette).

 

Sachant cela, vous n’avez plus qu’à composer votre ravitaillement selon vos besoins.

Hydratation

Pour finir, on ne saurait parler de ravitaillement sans faire un point sur l’hydratation, car cette partie est souvent la plus négligée. On boit ce que l’on a l’habitude de boire, peu importe les conditions, sans vraiment faire attention à ses besoins.

Sur des sorties de moins d’une heure où l’on ne transpire pas beaucoup, boire n’est pas nécessaire.

Mais sur des efforts plus longs et/ou plus intenses, la perte en eau devra être minimisée. Il n’est pas nécessaire de compenser 100% de ces pertes, car le corps sait supporter une légère déshydratation, à condition de bien boire une fois rentré à la maison.

Il existe des manières précises de calculer ses besoins en eau, mais elles impliquent de se peser avant et après l’activité, ce qui je l’avoue est très fastidieux (mais très utile aux personnes avec des objectifs de performance  -  pensez-y si c’est votre cas). Le plus simple est de partir sur une base arbitraire et de faire évoluer les quantités selon ce que l’on observe.

Ainsi pour les femmes, je recommande de démarrer avec 300 ml de liquide par heure. De l’eau plate ou de la boisson énergétique selon les besoins en sucre et les préférences personnelles. Les hommes, qui transpirent généralement plus que les femmes, viseront les 500 ml.

Faites quelques sorties avec ces quantités, voyez comment vous vous sentez et pour savoir si vous êtes bien (ré)hydraté, vérifiez la couleur de vos urines à divers moments de la journée.

Crédit photo Laurent Kurtzemann

Plus la couleur est foncée, plus vous avez besoin de boire pour vous réhydrater.

 

Après un effort, il est fréquent de se situer au milieu du tableau. Surtout si l’on transpire beaucoup. Pas de panique, il vous suffit de bien boire durant les heures qui suivent et de regagner progressivement les 3 premières cases de l’image. Par contre, si vous vous retrouvez très déshydraté, c’est que vous n’aurez pas assez bu pendant votre sortie. À l’inverse, si vous devez faire une pause pipi toutes les demi-heures et que vos urines sont systématiquement transparentes après votre sortie, c’est que vous buvez trop. Réduisez alors un peu les quantités les prochaines fois.